jeudi 31 juillet 2014

Invitations au voyage


Merci au groupe SMV pour cette très belle visite de l'exposition "Invitations au voyage" qui présente de très belles œuvres de la collection de la Société Générale.


J.-B. Huynh, Louvre, portrait de femme noire, 2012

Accueillis par un verre et un buffet, nous avons appris que la banque collectionne des œuvres d'art contemporain depuis 1995. Celles-ci sont accrochées dans les couloirs de la banque et accessibles à tous les employés. Deux fois par an, la banque fait appel à un commissaire pour réaliser des expositions thématiques. Cette année, et jusqu'à décembre, c'est Guy Boyer, rédacteur de Connaissance des arts, qui propose de nous évader à travers une sélection sur le voyage. 

A. Schneck, Sanké Bah, 2011
Nous avons parcouru pendant près de deux heures les espaces d'exposition en compagnie de deux médiatrices. L'exposition s'organise en différents thèmes : « A la découverte de l’autre », « Formes et couleurs », « Au pays du rêve », « Solidarité et entreprise » et « Horizons lointains »

J'ai été particulièrement séduite par les œuvres d'« A la découverte de l’autre » comme ces portraits d'Antoine Schneck et Jean-Baptiste Huynh. Cet homme, sans expression, est presque pétrifié dans cette image. Ses traits sont comme sculptés. Quant à cette femme au turban bleu, directement inspirée du Portrait d'une négresse de Marie-Guillemine Benoist exposé au Louvre, son regard est hypnotique. Fière et belle, elle s'impose au visiteur.

« Au pays du rêve » était également plein de belles surprises. Parmi celles-ci, les photographies de Nils Udo, un artiste du land art aux réalisations poétiques et subtiles ou d'Ellina Brotherus qui nous invite à revoir Friedrich.

N. Udo, Balançoire en feuilles de robinier, 1992

D'« Horizons lointains », je retiendrai les très nombreuses photos de Stéphane Couturier, le photographe des bâtiments de Le Corbusier. Personnellement, ce n'est pas ce que je trouve de plus intéressant dans la photo. Par contre, Jalal Sepehr nous conduit à la méditation, à l'envol sur un tapis volant ; Riboud nous fait nous sentir minuscules ; Barclay nous plonge directement dans l'ailleurs.

Une exposition fort intéressante, qui donne envie de parcourir le monde. Les oeuvres choisies sont souvent évocatrices et ne nécessitent pas de connaissances hyper poussées pour être appréciées.

Si vous avez envie de découvrir cette exposition, sachez que la Société Générale organise des visites sur son site

mercredi 30 juillet 2014

Maus

C'est ma copine Arsène qui m'a offert cette BD d'Art Spiegelman. Merci Miss !

Cette très épaisse BD (c'est une version intégrale), sombre, en noir et blanc, retrace l'histoire de Vladek Spiegelman pendant les années 1930-1940 et ses relations avec son fils Art, le dessinateur de BD, dans les années 1980. Dans cette bande dessinée, pas de visage humain. Les juifs sont des souris, les polonais des cochons, les allemands des chats, les américains des chiens, etc.

Régulièrement, Art se rend chez Vladek pour en savoir un peu plus sur son passé. De bon gré, son père lui raconte son quotidien dans les années 30 : c'est un jeune homme séduisant et plein d'avenir. Il épouse une riche héritière, Anja, et en a un fils, Richieu. En 1939, il est mobilisé par l'armée polonaise pour lutter contre l'Allemagne, fait prisonnier avant de regagner Sosnowiec. Les règles se durcissent envers les juifs : ils doivent porter l'étoile de David, respecter le couvre-feu, des exécutions sommaires servent d'exemple... Bientôt, les premiers mouvements de déportation et de rassemblement dans des ghettos se font jour. Vladek ne cesse de s'arranger pour faire vivre sa famille. Il éloigne Richieu, croit le mettre à l'abri. Jusqu'en 1944, Vladek se cache et déménage, de cachettes en planques. Mais c'est en essayant de passer en Hongrie qu'il est arrêté avec Anja et conduit à Auschwitz. Là-bas également, il ne cesse de s'adapter pour ne pas mourir. Il cultive le favoritisme des kapo et parvient à garder contact avec sa femme. Vladek survit au camp mais ce n'en est pas terminé pour autant. Commence alors la dispersion des prisonniers, avec les passages d'un camp à l'autre, les risques de croiser la wehrmacht en débâcle...

L'une des premières remarques après ma lecture, c'est que cette bande dessinée ne cherche pas rendre ses héros attachants. Vladek est un personnage tout sauf sympathique. Radin, autoritaire, intolérant, il exaspère son fils par ses nombreux travers (et le lecteur aussi). Peu confiant en la nature humaine, il ne compte que sur lui pour s'en sortir et c'est certainement ainsi qu'il survit. C'est d'ailleurs certainement ce qui m'a le plus gênée pour rentrer véritablement dans cette histoire : je n'aimais pas Vladek. Pas de victimisation ou de manichéisme, mais une vision sombre de l'homme, qui sauvera sa peau avant tout.

L'autre remarque, c'est que le dessin m'a bien plu, contrairement à pas mal de lecteurs. Le noir et blanc, qui permet à l'auteur de jouer uniquement sur les textures, est difficile à apprivoiser. Il donne une côté très sombre à cette histoire. Chaque case mérite que l'on s'y attarde, ou presque, car elle est souvent riche en détails (mimiques des personnages, sens des objets, des architectures).

Quant à la restitution historique, elle est bluffante : la montée des violences envers la communauté juive est bien montrée, reprenant les codes du nazisme et la paranoïa croissante de l'époque. Et la culpabilité des rescapés et de la génération suivante est aussi traitée.

Cette bande dessinée n'est pas un énième récit à partir des drames de la guerre. C'est un témoignage d'inspiration autobiographique sur l'holocauste. Un témoignage de la seconde génération qui voit sa famille complètement décimée.

Maus Art Spiegelman
D.R.

mardi 29 juillet 2014

Bernard Tschumi, concept et notation

C'est in extremis que j'ai pu me rendre au Centre Pompidou pour l'expo Tschumi. Fan d'architecture contemporaine, j'ai eu peur de rater ce rendez-vous avec l'architecte du parc de la Villette ! Par contre, ce billet arrivera trop tard pour les lecteurs qui n'auront pas pu se déplacer plus tôt.

Au programme, une exposition qui introduit aux grands thèmes de l'architecte mais qui reste assez inaccessible aux néophytes. Tout commence par les Manhattan Transcripts. Tschumi introduit l'idée du mouvement dans l'architecture, inspiré notamment par le cinéma. 
On passe ensuite aux programmes architecturaux. Ceux-ci peuvent s'accorder ou non aux usages du lieu. Le projet du nouveau Théâtre national de Tokyo, pensé comme une partition, est un espace flexible dont les éléments seraient juxtaposés. La galerie vidéo de Groningen est un rectangle de verre qui encadre et reflète les images. 
Il est ensuite question de façade. Pour Tschumi, c'est avant tout une enveloppe qui protège. L'architecte joue sur les enveloppes double, dont les matériaux contrastent. C'est ainsi le cas de l'étonnant siège de Vacheron Constantin, d'inox, de bois et de verre. 
Vient ensuite la question du contexte, qui n'est certainement nulle part plus criante qu'à Athènes où au Parthénon répond le musée de l'Acropole. L'architecte ne peut pas ignorer le monument, il doit au contraire trouver un terrain de dialogue avec le musée. Il doit également permettre de voir et de préserver l'architecture civile antique découverte sur le lieu même des fondations du musée. Dans cet espace, l'architecture sait se faire discrète tout en conduisant le visiteur jusqu'au sommet où les plâtres de la frise du Parthénon saluent le temple. Il illustre ainsi que l'architecture est un concept, un contexte et un contenu
Enfin, la visite se termine sur "formes-concepts". Il faut parfois s'extraire du contexte pour trouver le concept architectural qui saura le mieux exprimer certains projets. C'est évidemment le cas avec le parc de la Villette, construit sur une grille, mais aussi avec le site d'Alésia dont les bâtiments ronds évoquent l'idée de siège. 

La scénographie de l'exposition, conçue par Tschumi, ainsi que son plan sont autant d'échos aux idées de l'architecte, notamment à celle de mouvement. Ce dernier est d'ailleurs très présent à travers des interviews, expliquant ainsi sa démarche. Ces vidéos sont d'importants compléments aux panneaux de salle, ils permettent de mieux appréhender les modèles de l'architecte qui avoue par exemple sa fascination pour le Ponte Vecchio qui combine passage et architecture. 

Une exposition riche en documents, maquettes et interview qui permet de saisir quarante ans de créations artistiques et architecturales !

Athènes, Parthénon


lundi 28 juillet 2014

Cuisine et dépendances

Cette pièce de Jean-Pierre Bacri et Agnès Jaoui se joue encore deux jours au théâtre de Nesle où nous avons eu la chance de la découvrir vendredi dernier. Nous n'avions jamais mis les pieds dans ce théâtre. C'est l'un de ces petits endroits surprenants de Paris : une cave voûtée, une scène de quelques mètres carrés et une contenance très faible à Saint-Germain-des-Près.
Cuisine et dépendances

Le plot est simple : Martine et Jacques reçoivent ce soir. Au menu : des amis qu'ils n'ont pas vu depuis 10 ans, Georges, un pote qui squatte en attendant de retrouver un appartement et Fred, le frère de Martine, joueur de poker invétéré qui sort avec une donzelle court vêtue. Sauf que les amis de dix ans sont devenus un homme de la télévision et une journaliste brillante. Et que le passé n'est pas tout à fait enterré...
Dans la cuisine, nous assistons en différé à cette soirée. Entre hypocrisie et vérité, ce lieu devient the place to be pour ne pas étouffer !

L'histoire d'un dîner presque ordinaire, qui ne se déroule pas complètement comme on aurait pu l'espérer. Georges passe son temps à faire la tête et à râler (mention spéciale d'ailleurs à l'acteur qui l'incarnait). Fred tire des sous à tout le monde. Martine regrette de n'avoir pas une vie plus folle. Charlotte, la journaliste, est devenue la femme invisible à côté de son brillant époux. Et Jacques n'a qu'un but : que tout se passe bien (pas très convaincant dans son rôle par contre). Une soirée qui fait révélateur ! 

Une prestation sympathique pour une pièce qui fait rire et sourire les spectateurs.

Cuisine et dependances théatre

dimanche 27 juillet 2014

Le voyage des pères

Voici une BD de David Ratte que j'ai lue depuis plusieurs mois. Je n'avais pas pris le temps de vous en parler. En la recroisant et en la feuilletant à nouveau, j'ai eu envie de vous dire tout le bien que j'en ai pensé. 

L'histoire est originale : imaginez trois pères qui partent à la recherche (voire à la poursuite) de leurs fils, devenus les disciples de Jésus. Ces trois pères sont Jonas, père de Pierre et André, Simon, père de Judas et Alphée, père de Matthieu. Perplexes devant cette fuite, ils suivent leurs fils aux miracles que sème le Christ sur son chemin. L'occasion pour ces hommes de papoter voire de philosopher au coin du feu. Et de se remettre en question. 

Jonas est particulièrement attachant. Il ne croit pas une seconde aux miracles de Jésus et prend ses fils pour des paresseux illuminés, qui croient ainsi échapper à leur devoir : nourrir la famille. Tout ça pour aller traîner avec un type qui parle d'amour... Et ce Jésus ne doit pas être un type bien : il a guéri la belle mère de Jonas, mourante. Franchement, il y a de quoi être grognon !

Voyage des peres Jonas
D.R.

Bourrée d'humour et de clins d’œil à la Bible, cette BD peut aussi devenir très touchante, surtout à Jérusalem pendant la Passion. Pas besoin de connaitre les Évangiles sur le bout des doigts, cette BD les rend accessible et en retient les moments forts, sans prosélytisme ni iconoclasme. Bref, elle porte un regard assez bienveillant mais plutôt neutre sur tout cela. Elle est pleine de rencontres et d'échanges, et nous permet de jeter un regard sur les coulisses de la grande histoire. Quant aux dessins, ils sont assez classiques mais plaisants. 

Lue dans sa version intégrale, ce road-movie biblique est constitué à l'origine de trois tomes.

vendredi 25 juillet 2014

Ton cauchemar

Ce petit livre de Malika Doray s'adresse aux plus jeunes. Il parle d'apprivoiser ses peurs et ses cauchemars. 

Imagine un monstre violet et ailé, entre l'aigle, la chauve souris et le lapin, qui fonce sur toi, pauvre petit lapinou. Tu n'en mènerais pas large ! Mais avec un peu de douceur, tout cauchemar peut-être apprivoisé !

cauchemar Malika doray

Un petit livre très simple, aux jolies couleurs, au texte court. L'image dépouillée et coloré donne toute sa force aux jeux de regards des personnages. Bref, c'est charmant et ça plait aux enfants !

jeudi 24 juillet 2014

Il était une fois l'Orient Express

Vous n'avez pas pu manquer cette exposition, il y a de la pub partout et la présence des wagons sur le parvis de l'Institut du monde arabe a fait couler beaucoup d'encre.

Après avoir dûment réservé nos billets, nous voilà partis pour une trentaine de minutes d'attente le long des wagons du train de légende. De quoi l'observer tranquillement et prendre connaissance des premiers panneaux (historique, engouement et inspiration). Par exemple, pas besoin d'aller au Far west pour se faire détrousser : les pillards attaquent aussi en Orient. 


Orient Express Institut du monde Arabe

Puis, nous sommes accueillis par un "guide" qui nous campe rapidement le contexte des trois wagons (Salon Pullman Flèche d’Or n°4159, Voiture Bar Pullman Train Bleu n°4160, Voiture Lit - Type Ytb n° 3927) : des couchettes, un salon et un bar sur roues, capables de traverser l'Europe jusqu'à Istanbul. Ces espaces sont mis en scène grâce à des journaux, des jeux de cartes, des verres, des bagages, des costumes... et même un macchabée. Eh oui, pour Le Crime de l'Orient Express de cette chère Agatha Christie. 

Orient Express cabine Josephine Baker

Tous ces détails, à l'exception du crime, rendent l'intérieur très cosy, très connoté années 1930. On s'attend à voir Josephine Baker entrer dans sa cabine. Parmi les petits dispositifs sympathiques, notons les reproduction des journaux papier de l'époque qui intègrent l'écran d'une tablette et laissent voir des actualités des années 20-30. Tout cela est donc très décoratif mais très peu muséal : pas de cartel ou d'explication, c'est votre guide qui devrait les donner... mais il n'est pas toujours très bavard. On admire au passage le décor très Art déco des wagons et notamment le travail de Lalique. 

Puis, 10-15 minutes après être entrés dans les wagons, il vous faut déjà sortir. Il faut dire que derrière vous, ça enchaîne ! Pas moyen de s'attarder ou de faire demi-tour, vous voilà à nouveau sur le parvis. Un peu frustrés, il faut bien l'avouer, de n'avoir pu regarder les détails de ces reconstitutions.

Orient Express LaliqueVous pouvez désormais attaquer la partie plus classique de l'exposition : deux grandes salles nous parlent à nouveau de l'histoire du train et de son inventeur Georges Nagelmackers. Beaucoup de films, des produits estampillés "Orient express" (vaisselle), des cartes, du mobilier, des affiches, des informations sur les locomotives, présentés dans d'immenses malles de voyages (scéno que j'ai trouvé hyper sympa). La première salle est un peu fourre-tout et assez mal agencée : tu ne sais pas trop pourquoi on choisit de te montrer ce qu'on te montre. Heureusement, comme il y a pas mal de groupes, il est possible de capter des bribes d'infos et donner quelques réponses à des questions qui te tourmentent depuis le début de l'expo, genre l'écartement des rails. Eh bien figurez-vous que c'était le même écartement partout puisque le créateur de l'Orient Express n'a pas uniquement affrété des trains de luxe mais créé tout le parcours et mis en place la ligne.

La seconde salle est plus claire. Elle s'attache à l'Orient et aux destinations desservies par l'Orient Express et le Taurus Express, de Venise au Caire en passant par Istanbul, Jérusalem, Alep, Bagdad et tant d'autres villes au nom mythique. Il est intéressant de voir les rêves que véhiculent l'Orient : les touristes se griment en orientaux, ils découvrent des sites historiques, des odalisques (il doit y avoir un quota de filles nues par expo)... Et le train favorise le développement de l’hôtellerie de ces pays lointain par la compagnie des wagons-lits qui a bien compris que le voyageur qui peut s'offrir l'Orient Express descendra dans les meilleurs hôtels.

Cette exposition nourrira plus votre imaginaire que votre intellect. Elle joue sur le mythe de l'Orient Express, l'assaisonnant d'informations historiques et techniques (peu nombreuses), et surtout sur le voyage qu'est la traversée du train pour le visiteur. Les salles d'exposition sont les seuls espaces réellement informatifs mais cette information est dispersée, comme si le visiteur ne venait pas pour apprendre quelque chose mais simplement pour s'émerveiller du luxe et de la beauté du train et des pays qu'il traversait !

Orient Express bar

mercredi 23 juillet 2014

Dragons 2

Les producteurs du petit bijou de la Dreamworks sur lequel nous avions craqué à l'époque sont heureux de vous présenter... la suite ! 

Le second opus dont a accouché le studio d'animation se déroule quelques temps après la fin du premier film. La petite bourgade de Beurk a bien changé depuis que Hiccup a montré à tous que les dragons n'étaient pas des ennemis, mais qu'ils pouvaient se révéler être de parfaits animaux de compagnie. Les sanglants combats de dragons ont laissé place à des courses à dos de reptiles ailés, la forge qui autrefois fabriquait des armes pour les combattre ne produit plus que des selles ou des dents de rechange pour nos amis cracheurs de feu... Bref tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes ! 

Et comme à dos de dragon, tout devient plus accessible, Hiccup ne loupe jamais une occasion de s'échapper aller explorer les îles environnantes. Alors que son père veut faire de lui le prochain chef du village, lui n'a que l'appel du large en tête...
Au détour d'un nouvel archipel, Hiccup et sa chère et tendre Astrid vont malencontreusement tomber sur un gang de chasseurs de dragons, mené par le ténébreux Eret, fils d'Eret. Et ils se rendent vite compte qu'il n'y a pas qu'à Beurk que les vikings montent des dragons. Et que le chef de la tribu en question a des manières fort peu commodes, et une toute autre approche de la relation homme-dragon... 

DR
Franchement, cette suite mérite pleinement les excellentes critiques qu'il a reçues. Certes, l'univers étant déjà connu, on n'est plus autant émerveillé devant l'inventivité dont ont fait preuve les équipes de Dreamworks. Mais les bases qui ont fait le succès du premier opus sont toujours là : on retrouve la bouille trop mignonne de Tothless, le dragon aux manières de chat, notre héros qui a toujours autant de mal à gérer la relation avec son père, le forgeron bourru... Dragons 2 introduit également une série de nouveaux personnages, qui prennent parfaitement leur place dans la trame de l'histoire. Un lot de nouveaux lieux et dragons fait aussi son apparition, et le travail qui a été fourni pour étoffer l'aspect et le caractère de chaque espèce est impressionnant : on a vraiment envie d'avoir son propre dragon !

Si le sujet principal du film tourne toujours autour de la tolérance et du dépassement des préjugés, le scénario est un poil plus complexe qu'attendu : ainsi l'aventure laisse parfois la place à des séquences plus sérieuses, voire carrément tristes... C'est quand même l'humour qui domine, et sur ce registre il y en a bien pour les grands comme pour les petits. 

Foncez donc voir cette petite merveille, en VOST et en 3D s'il vous plait ! Moi, j'attends le n°3 de pied ferme...

mardi 22 juillet 2014

11 livres inattendus à mettre dans ta valise !

Vous trouverez dans cette chronique quelques suggestions de lecture pour votre été. J'ai choisi ces titres parce qu'ils vous parleront de vacances, vous permettront de voyager, que vous soyez sur les plages ou au boulot. Par contre, évitez les pour la rando car comme c'est le moment des pavés, je vous en ai mis quelques uns. Enjoy !

Une plage sauvage pour tes vacances

La Horde du contrevent d'Alain Damasio et Autant en emporte le vent de Margaret Mitchell vous apporteront un peu d'air sur les plages brûlantes.

Le Manuel de l'antitourisme de Rodolphe Christin vous parle de la "consommation" touristique et de l'uniformisation des paysages exotiques. Pour voyager responsable !

Le Premier été d'Anne Percin a un parfum d'été et de nostalgie. C'est un récit qui renoue avec l'adolescence et qui rapproche deux sœurs éloignées par le temps. 

Rêves de garçons de Laura Kasischke se déroule dans un camp de vacances tout ce qu'il y a de plus banal. Mais nos trois héroïnes n'oublieront pas cet été de sitôt !

Quatre sœurs de Malika Ferdjoukh est une très belle histoire de famille, de cinq sœurs qui grandissent à mesure que passent les saisons. Il faut toutes les lire... et le dernier tome se déroule en été !

La Roue et le stylo de Catherine Bertho-Lavenir propose une histoire du tourisme par le récit des progrès techniques.

L'assassin royal de Robin Hobb ou Le trône de fer de G.R.R Martin ont bien besoin d'un été pour être dévorés tout entier. 

La Dame n°13 de José Carlos Somoza vous fera certainement frissonner ce qui n'est pas de trop aux heures sans ombre.

Le Château des destins croisés d'Italo Calvino vous permettra de jouer les cartomanciennes avec des héros médiévaux. C'est quand même plus stylé que le tarot de l'été !

Ce que je lis ? Confiteor de J. Cabré, c'est mon petit pavé du moment. Mais que faire lorsque je l'aurai terminé ? Qu'avez-vous à me proposer pour supporter un été parisien en m'évadant par la lecture ? 

lundi 21 juillet 2014

Par-delà le crime et le châtiment

Sous-titré "Essai pour surmonter l'insurmontable", ce livre de Jean Améry est celui d'un déporté, rescapé d'Auschwitz. Vous allez me dire qu'il y a déjà eu beaucoup d'ouvrages sur le sujet et qu'il commence à dater. A lire cet essai, l'écrivain et journaliste porte un regard analytique sur la shoah. Il parle finalement assez peu de lui et cherche à tirer une analyse sociale de l'Allemagne nazie.

Arbre en fleurs

Voici comment se compose cet essai :

Aux frontières de l'esprit

Un intellectuel à Auschwitz, c'est un homme sans qualification, un homme qui héritera des plus basses besognes : porter des poids, creuser des trous. Il essaiera d'en appeler aux ressources de la mémoire et de l'esprit : réciter des vers. Mais pour se rendre compte que la poésie est incapable de transcender le camp. Et les jeux de l'esprits se trouvent coupés de références sociales dans un camp où celles-ci ont été perverties. La logique SS prend le pas sur tout : si au début, l'esprit la questionne, il ne peut rien opposer à la force brutale et destructrice.
Il parle aussi de la force des prisonniers religieux ou engagés politiquement qui arrivent à dépasser et à transcender la réalité du camp, faisant "partie d'un continuum spirituel". L'individu n'est pas une fin en soi pour eux alors que l'agnostique n'a que lui et sa réalité à laquelle se raccrocher.
Il est également question de la mort. L'idée de la mort à la manière des Romantiques est insoutenable à Auschwitz. Les élaborations esthétiques et métaphysiques sur la mort s'effacent au profit de la question de la mort la moins pénible. L'idée de la mort n'est plus questionnée, elle est une évidence, une compagne. C'est la douleur et la longue agonie que chacun veut éviter.
Bref, outre l'anéantissement du corps, c'est toute la vie de l'esprit qui est anéantie : la beauté, la connaissance n'existent plus. Et quand l'auteur s'interroge sur ce qu'Auschwitz lui a appris, c'est terriblement déprimant. Il n'est pas devenu plus sage. Il a juste pris conscience que l'esprit est un jeu : "cette reconnaissance a mis un terme à pas mal des présomptions et autres suffisances métaphysiques, mais en même temps à beaucoup de joies spirituelles naïves et à un certain sens fictif de la vie".

La torture

En Belgique, où notre auteur avait cru échapper à l'Allemagne nazie, le fort Breendonk a servi de camp d'accueil pendant la Seconde Guerre Mondiale. Arrêté pour faits de Résistance, Améry a été fait prisonnier et torturé dans ce lieu. Au premier coup, c'est sa "confiance dans le monde" qui disparaît. A savoir que le bourreau n'a pas le respect de son espace physique, il impose sa propre corporalité à l'autre. Et il n'y a pas d'espoir ici que cela s'arrête, que quelqu'un apporte aide ou réconfort contre la douleur. L'homme n'est plus qu'un corps, un corps en proie à la douleur. Mais le but n'est pas de le tuer, le but est de lui faire mal, toujours plus mal.
L'auteur nous dit que la torture est l'essence même du Troisième Reich. Que le nazisme est sadisme au sens de négation de l'autre. Il ne croit pas à la banalité du mal qu'énonce Arendt, il pense au contraire que le mal transfigure la banalité de l'homme.

Dans quelle mesure a-t-on besoin de sa terre natale ?

Né à Vienne, notre auteur a dû fuir en Belgique. Il souligne ici l'importance de la patrie, du "heimat". D'abord parce que c'est un lieu sécurisant, dont on comprend les codes. Pour lui, l'internationalisme culturel ne peut se faire que lorsque la sécurité nationale est assurée. Ce qui ne sera pas sans évoquer pour les plus attentifs les questions de Rolland et Zweig.
Parmi les succédanés de terre natale, il évoque la religion, l'argent, la gloire, etc. Et que reste-t-il de cette terre natale à l'étranger, en exil ? La langue et le besoin impérieux de la parler, de préférence pour discuter du pays avec des concitoyens. Il parle également du besoin que la patrie demeure. Lorsqu'elle est conquise et rattachée à un espace plus large, elle s'y dilue et ne permet plus à l'auteur d'être intériorisée comme terre natale. Il se montre ainsi terriblement méfiant face à l'Europe qui alors se construit.

Ressentiments

Comme victime, l'auteur explique son ressentiment envers les criminels nazis qui vieillissent en paix. Il attendait de l'Allemagne un long moment de repentir, d'éloignement de la scène mondiale. Et il assimile peuple allemand, qu'il soit du parti ou non, à Hitler. Il accuse l'Allemagne de faute collective, que rien ne pourra réparer. 

De la nécessité et de l'impossibilité d'être juif

Juif mais ne croyant pas au Dieu d'Israël et n'ayant jamais mis les pieds dans une synagogue, Améry a des difficultés à se sentir juif. Il ne se sent pas juif mais les autres voient en lui un juif. Ce sont les lois de Nuremberg qui font de lui un juif, le mettent en danger de dégradation sociale puis de mort. Mais finalement, l'auteur trouve que l'antisémitisme ne s'est pas amoindri après Auschwitz, bien au contraire. Et plutôt que de se laisser aller à la joie de la paix retrouvée, l'auteur reste sur ses gardes, craignant de nouvelles persécutions. C'est son passage par Auschwitz qui fait de lui un homme solidaire de tous les juifs.

Ce long essai sur la victime juive après Auschwitz diffère de ce qu'on lit habituellement sur le sujet. Car les livres publiés sont plutôt des témoignages de la vie dans les camps de concentration que sur la vie après la libération des prisonniers. Cette difficulté à faire confiance, à pardonner, cette peur de voir le monde oublier si vite, sont absolument sensibles dans cet essai qui touche, souvent, au témoignage. Car l'auteur est à la fois l'analyste et la victime, et il a parfois bien du mal à ne pas laisser son expérience prendre le pas sur sa logique comme il l'explique lui-même. Un ouvrage important sur la shoah, par un survivant qui n'arrive ni à retrouver une place dans la société, ni à retrouver goût à la vie. Les mots d'un homme pessimiste, parfois amer, mais qui sonnent souvent justes. 

vendredi 18 juillet 2014

Le mythe Cléopâtre

A la Pinacothèque se tient, et pour tout l'été, une exposition sur cette femme légendaire, qui a su se faire aimer des plus grands hommes de son temps, César et Marc-Antoine. Malheureusement pour elle, pas d'Auguste...

Cléopatre, Moreau


La première partie de l'exposition s'attache à la reine d'Egypte, à sa famille, les fameux Ptolémées, à ses amours, à sa défaite. On trouve aussi des informations sur les religions de l'Egypte, ses productions,  ses décors, Alexandrie, bref, ce qui fait sa vie quotidienne. Là, on s'étonne que le buste de Turin soit appelé Cléopâtre dans le cartel, sans nous dire que cette identification fait débat (oui, ici encore, les cartels ne sont pas très bavards). Que dire d'autre ? Passée la première salle, on parle un peu de tout sauf de Cléopâtre, ça fait un peu fourre-tout, d'ailleurs, les objets présentés sont souvent d'époque ptolémaïque, mais pas spécifiquement du règne de celle-ci (à l'exception de quelques objets que l'on peut dater précisément comme les monnaies). Par exemple, je ne comprends pas pourquoi le bronze dit de Ptolémée Apion est sorti du musée archéologique de Naples. Parce qu'il est beau ? Car ce qu'on ne peut pas reprocher à la Pinacothèque, c'est la qualité générale des objets présentés, issus de collections prestigieuses (comme la BNF, le Vatican et d'autres musées italiens).

La seconde partie est toute entière dévolue au mythe. Et là, c'est devenu très décevant pour moi. Des tableaux présentés, peu valent réellement le détour à l'exception du Guido Reni. Pas de Tiepolo (une esquisse suffisait), peu de XVIIIe et de XIXe alors qu'on attendait Natoire, Cabanel, Moreau, et bien d'autres. Et la suite s'attache essentiellement aux représentations théâtrales et cinématographiques de la reine d'Egypte, présentant costumes et extraits vidéo. Vous pourrez admirer les robes de Monica Belluci ou Elizabeth Taylor par exemple (c'est quoi cette mode de mettre des vêtements dans toutes les expos ?). 

A vouloir tout dire, cette exposition ne dit malheureusement pas beaucoup. Peut-être aurait-il fallu s'en tenir à la seconde partie et l'étoffer un peu ? Ou aborder un seul aspect de la reine (ses amours, sa mort) ? Car on a l'impression que la seconde partie aurait eu besoin de plus de place (et d’œuvres et d'analyses) pour apporter véritablement quelque chose. Dommage car le sujet me plaisait bien !

jeudi 17 juillet 2014

Histoire de chambres


Je connaissais les travaux de Michelle Perrot sur l'histoire, notamment l'histoire des femmes. Mais lorsque j'ai vu ce titre, je n'ai pas hésité bien longtemps. J'aime ces essais qui racontent l'histoire et les usages des lieux.

Chambre XXe siècle
Voici ce que raconte cet ouvrage ; les titres des chapitres seront indiqués comme celui-ci, qui constitue l'introduction : 

Musiques de chambres



La chambre du roi

Chaque thème est abordé par plusieurs biais : archives historiques, littérature, cinéma, etc. Ainsi, la chambre du roi est certainement la plus facile à documenter car visible de tous, avec des rituels bien établis autour du lever et du coucher. Ce n'est d'ailleurs pas la chambre où dort le roi. Cet usage de la chambre, qui permet de contrôler les courtisans, de les hiérarchiser selon les espaces (de l'antichambre à la balustre) et d'écouter leurs doléances, c'est bien sûr Louis XIV qui lui a donné son faste. Il tombe en désuétude sous Louis XV.


Chambres à coucher

Pour ce qui est de la chambre à coucher, figurez vous qu'avant d'être une pièce personnelle, c'est plutôt une salle commune, où toute une famille dort ensemble. Bonjour l'intimité ! On parle aussi du lit clos qui rapproche parfois plusieurs générations. Il est également question de la chambre conjugale, cette chambre procréatrice, centrée autour du lit.


La chambre particulière

Puis la chambre particulière est un désir presque universel. C'est un lieu de secret, d'intimité. Un lieu de lecture, de méditation, de prière, d'écriture, autant que de sommeil. Un refuge loin des autres. C'est cette volonté d'une "chambre à soi" que prône V. Woolf.


La chambre d'enfant

Quant à la chambre d'enfant, qui occupe aujourd'hui les plus belles pages des catalogues de décoration, elle a mis du temps à s'imposer. L'enfant dort d'abord avec ses parents, dans leur lit puis dans son berceau. Elle existe comme chambre des enfants (au pluriel) dans les hautes sphères dès le XVIIIe siècle et s'impose à l'époque victorienne. C'est surtout à la fin du XIXème siècle et au début du XXème que les plans des maisons intègrent cette nouvelle pièce. C'est une chambre qui évolue avec l'âge, de celle que la future mère prépare pour le nourrisson jusqu'à la chambre de l'adolescent.


La chambre des dames

C'était celle qui m'intriguait le plus. La chambre, c'est l'espace féminin par excellence. Celui où, pudique et secrète, elle appartient. Car la femme doit souvent rester cachée, habitante de l'intérieur, responsable de la maisonnée mais pas des affaires publiques. Gynécée, chambre de la Vierge, sérail, couvent, etc. les femmes sont assignées à des lieux qui sont purement les leurs, où elles exercent des activités dites féminines (couture, prière, rêverie... Et prostitution et accouchement). C'est aussi le lieu où les précieuses reçoivent et réinventent les lettres.


Chambres d'hôtel

Les chambres d'hôtels sont ces lieux de passage, ces chambres qui ne sont jamais vraiment les vôtres mais qui vous hébergent au milieu d'un voyage. Mais initialement, les hôtels et auberges ne sont pas spécialement accueillants : rarement propres, sans place pour la toilette, ils ne se modernisent qu'au début du XXème siècle comme le signalait C. Bertho-Lavenir. C'est aussi l'espace de l'homme qui ne veut pas s'attacher à une maison, à une famille comme Sartre ou Genet.


Chambres ouvrières

M. Perrot nous décrit ensuite les habitats précaires des ouvriers, espace que les penseurs du XIXème s'attachent à moraliser et à améliorer. C'est aussi le lieu qui reflète de l'ascension sociale, un lieu que l'on décore et que l'on meuble, un lieu qui s'agrandit à mesure que l'on gagne plus.


Lit de mort et chambre du malade

La partie sur la chambre du malade parlera beaucoup aux amoureux de Georges Sand et d'Alice James. On y vit ses dernières heures, entouré ou non des siens, qui gardent parfois cette chambre comme un sanctuaire autour du défunt, le temps d'une génération, ou de façon permanente pour certains hommes célèbres. C'est aussi le moment où il est question de la chambre d'hôpital, un grand dortoir commun où chacun tente de construire des cloisons : là aussi, on recherche de l'intimité.


Huis clos

Dans la dernière partie, "Huis clos", il est question de séquestration. Celle d'une femme qui doit soigner ses nerfs et qui sombre dans la folie comme C. Perkins Gilman, celle des prisonniers, celle des ermites et artistes qui de retirent du monde, celle aussi des amoureux qui cherchent une cachette pour leurs ébats, celle des enfants punis ou maltraités : toutes ces chambres ont un point commun, elles restent closes sur elles-mêmes.


Chambres fugitives

Enfin, l'auteur conclut sur ces chambres disparues, celles de l'enfance, celles des hommes du passé... Au delà de l'histoire du corps, la chambre renseigne sur l'histoire des sociétés, de l'imaginaire, etc.


"Quitter"



Très dissert sur l'histoire du XVIIIème au XXème siècle, cet essai évoque également les temps lointains, le lit d'Ulysse et les chambres médiévales notamment. Temps plus anciens et moins documentés, ils manquent parfois au tableau. Cependant, cet ouvrage est d'une extrême richesse et esquisse une très belle image d'un espace polysémique. A la frontière des genres, entre histoire et littérature, ce livre ouvre beaucoup de pistes à explorer. Et il peut d'ailleurs se lire dans l'ordre qui vous plaira, ses chapitres sont indépendants et l'index fourni permet de retrouver directement la personnalité que l'on cherche. Si quelqu'un est tenté, il y a notamment une histoire de la chambre dans les romans policiers, une histoire de la chambre d'écrivain, et beaucoup d'autres histoires de chambres à écrire !

Objectif PAL

PAL plan Orsec

mercredi 16 juillet 2014

Les enfants d'Alexandrie


Ce roman de Françoise Chandernagor est dans ma PAL depuis plusieurs mois. Je ne savais pas trop ce que j'y trouverai, l'ayant assez peu croisé sur les blogs ou dans la presse. Bien entendu, j'espérais un roman aussi passionnant que L'Allée du roi dont je garde un souvenir émerveillé.

Antoine et Cléopâtre, voilà un couple mythique qui a tellement inspiré romanciers, cinéastes, poètes ou dramaturges qu'il ne peut être mis en scène sans souffrir de l'ombre de Shakespeare ou de Mankiewicz. Eh bien, notre auteur ne les évoquera que par le regard de leurs enfants et plus spécialement de Séléné. Cette fillette du couple maudit, jumelle d'Alexandre-Hélios, Françoise Chandenagor l'imagine brunette, un peu laide, pendant mélancolique, lunaire, du brillant Alexandre. Fiancée à Césarion, le fils de Cléopâtre et César, elle évolue dans les jardins des palais d'Alexandrie. A vrai dire, on ne saura pas grand chose de cette fillette, vivant dans l'ombre de ses parents, les accompagnant durant leur séjour à Antioche, servant d'intermédiaire entre sa mère et son père suite à la déprime de Marc-Antoine après Actium. Ou alors, on en saura plus dans la suite du roman (trois tomes en tout). C'est ce que je regrette à vrai dire dans ce roman : on nous annonce que Séléné sera le cœur de l'ouvrage, mais elle peine à apparaître, cachée par l'éclat de ses parents. Dommage que ce premier tome soit finalement une énième version des amours de Cléopâtre et de son bel amant.

Alma Tadema, La question

Ce roman historique nous plonge dans l'Alexandrie qui voit la fin des Ptolémées, dans une Méditerranée qui connaît alors plus le nom d'Alexandre que celui d'Octave, dans une cour d'Egypte richissime, qui fait pleuvoir l'or sur chaque banquet. Avec beaucoup de finesse (et de justifications), Françoise Chandernagor nous introduit dans une Antiquité déjà maintes fois contée mais avec érudition et passion pour cette petite oubliée de l'histoire qu'est Séléné. Avec elle revivent le phare et les palais d'Alexandrie, les "Inimitables" mais aussi les esclaves (nourrices, précepteurs et tout ce petit escadron toujours présent), les cyprès d'Antioche et les chats destinés à être momifiés. Bref, un roman à découvrir pour ses aspects évocateurs de l'Egypte grecque au tournant de son histoire plus que pour les aventures de ses protagonistes.

Bientôt, je vous parlerai à nouveau de Cléopâtre, je suis allée voir l'expo de la Pinacothèque. 

challenge amoureux


plan orsec pal

lundi 14 juillet 2014

La théorie des cordes

Et voilà, je viens moi aussi de dévorer ce roman de Somoza. En l'espace d'une journée. C'est la que je regrette de ne pas faire le challenge Pavés de l'été ! Oui, c'est le genre de roman que tu ne pourras pas lâcher avant de connaître le fin mot de l'histoire !

Je crois que c'est l'un des meilleurs voire le meilleur que je lis de cet auteur. Comme vous le savez, il aime centrer ses romans sur un thème bien spécifique (art, traduction, création littéraire, poésie, etc.). Ici, c'est la physique et ses implications concrètes. Sans faire à nouveau un résumé de ce roman, sachez qu'il n'y pas besoin d'être calé en sciences pour l'apprécier et le comprendre.

Il pose la question, assez classique, du progrès et de l'éthique : quand faut-il cesser les expériences ? Y a-t-il des limites que la science ne doit pas franchir ? Est-ce quand cela met le chercheur en danger ? Ou l'humanité ? Toutes les expériences sont-elles bonnes à faire ? Peut-on séparer philosophie, théologie et science ? Bien entendu, le scénario de Somoza oriente le réponse qu'on a envie de donner !

Enfin, il sait comme personne questionner la psychologie des personnages, leurs sentiments voire leur inconscient. Et nous montre que sous les visages les plus sereins, des émotions violentes peuvent couver.

Je vous laisse découvrir ou redécouvrir l'histoire de cet opus à travers ce billet de l'Amoureux, republié plus bas à l'occasion de ma lecture.

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Praline sait toujours trouver les sujets qui vont faire frémir d'envie son Amoureux : c'est encore une fois le cas avec La Théorie des cordes de Somoza. La physique théorique a en effet ceci de fascinant qu'elle cherche à répondre à l'une des questions les plus importantes au monde (comprendre l'univers, depuis sa création), d'une des façons les plus humbles qu'il soit : par les mathématiques et le raisonnement scientifique.
Il n'est pas exactement question de la création du monde dans ce livre, mais d'un développement de la théorie des cordes fort plausible : en réussissant à ouvrir des cordes de temps du passé, on pourrait projeter sur un simple écran de télévision l'information qui serait contenue dedans : en un mot, voir le passé.


C'est le prodige que cherche à réaliser une équipe de théoriciens, menée par le pofesseur Blanes, et dans laquelle figure notre héroïne, Elisa Robledo, physicienne talentueuse et très sexy... Seulement, pas question de mener ces recherches au coût astronomique au CERN, mais sur une île paradisiaque perdue au milieu de l'océan, avec de l'équipement financé par Eagle Group, une organisation aux méthodes aussi directes que louches.
Bien sûr, rien ne va se passer comme prévu et l'équipe de chercheurs qui va essayer de voir le passé ne va pas sortir indemne de cette expérience. Une vague de disparitions et de meurtres atroces semble en effet la cibler quelques années après les évènements, sans qu'Eagle Group ne daigne informer ses anciens membres ou réunir à nouveau l'ancienne équipe. 

Des passages au temps de la narration en flashbacks, le lecteur va peu à peu réussir à recoller les morceuax pour comprendre ce qu'il s'est réellement passé, et plonger avec les survivants dans l'horreur à laquelle ils sont confrontés.

Autant vous le dire tout de suite : ne lisez pas ce livre si vous êtes d'un naturel stressé :)
Somoza m'a baladé d'un bout à l'autre de l'ouvrage, en créant chez moi une impressionante quantité d'émotions et de réactions... Arrivé à la moitié de celui-ci, on ne veut plus le lacher, on veut savoir, comprendre, s'en libérer finalement !
Ce mélange de fantastique, de thriller et de polar est incroyablement efficace : je ne peux que vous le recommander vivement !

dimanche 13 juillet 2014

Amos et le pays noir

Voici un très joli album jeunesse d'Anne Cortey, illustré par Janik Coat. A vrai dire, c'est le koala qui m'a attirée ! Je trouve cette petite bête charmante.

Amos est un koala coloré. Rouge, bleu et jaune dans un pays tout noir. Amos n'a pas d'amis, il est si différent. Mais lorsqu'il découvre une boite remplie des couleurs de l'arc-en-ciel, il donne joie et vie à ce triste lieu. Un livre qui n'est pas sans rappeler Noa, de l'autre côté

Un dessin assez simple, qui prend toute sa dimension avec la couleur cohabite avec un texte court : un album à découvrir ! 



samedi 12 juillet 2014

Encyclopédie de la web culture

Ce livre de Titiou Lecoq et Diane Lisarelli se propose en quelques entrées de faire le tour de la culture web. Ambitieux, n'est-ce pas ? 

Comment ça il n'y a pas de culture web ? Et ce serait même une sous-culture selon certains. A défaut de lui donner des lettres de noblesses, cette encyclopédie fait le point sur les grandes figures du web, les sites à ne pas rater, les moments historiques de la construction de cette culture, son influence sur les sociétés, etc. Oh, ce n'est pas un livre technique (je vois les non geeks trembler).

Par ordre alphabétique sont expliqués et illustrés les blogs, les fails, les gif animés, les Lolcats, les mèmes, le point Godwin, etc. Ainsi, vous découvrirez qu'Apple est pour ses adeptes une religion, dont les Apple Store seraient des temples et Steve Job, le gourou. 

Le gros danger de ce livre ? Vous aurez envie de passer encore plus de temps sur You Tube pour mater des vidéos toutes plus stupides et drôles les unes que les autres.

Porté par un ton léger et pédagogique, ce livre montre un web dédié au divertissement, où tout est très vite old (les frises chronologiques en sont de bons exemples) mais où l'on surfe toujours sur les mêmes blagues et les mêmes références. Bref, c'est un monde avec son langage, ses codes, ses stars et ses zones d'ombre. 
A la fin du livre, vous pourrez même découvrir votre degré de geekitude à travers un test. Bon, je préfère ne pas vous donner le résultat, ma maman serait effrayée.

Lolcat web culture

vendredi 11 juillet 2014

Qu'est-ce qu'on a fait au bon dieu ?

Pour mieux vivre un dimanche pluvieux et frais de juillet, tu as plusieurs solutions :
- Rester chez toi avec un bon livre et un thé (sauf si tu n'as rien envie de lire, que ta PAL t'angoisse et que tu as justement besoin de farfouiller en librairie. Mais c'est dimanche, elles sont fermées).
- Aller voir une expo (sauf que ton cher et tendre n'est pas motivé, qu'il n'aime ni les Mousquetaires ni les Indiens)
- Se faire un ciné entre potes

Tu choisis la dernière option et le suffrage désigne Qu'est-ce qu'on a fait au bon dieu ? (ça a failli être Dragons 2 mais il n'y a pas de VO le dimanche après-midi). Un film en salles depuis avril, ça ne peut être qu'un bon film, non ? Surtout quand tu sais que la plupart ne passent pas deux semaines !

Qu'est-ce qu'on a fait au bon dieu film
DR

Le scénario est simple : quatre filles, trois maris d'origine et de religion différentes. Un arabe, un juif et un chinois. Sauf que les parents le vivent mal. Catholiques, originaires de Chinon, ils ne sont pas spécialement ouverts. Alors quand la quatrième fille annonce son mariage avec un black, ça ne passe pas. 

Une comédie sur la tolérance et la peur de l'autre, avec quelques bonnes réparties, qui fait sourire au début, avant de lasser. Mais l'ensemble traite plutôt mal du racisme en accumulant clichés, situations caricaturales et blagues limites. En plus, il fait déjà démodé et vieillot, c'est quand même fou, non ? 

jeudi 10 juillet 2014

Mousquetaires !

Encore une expo qu'il va falloir aller voir rapidement car elle se termine lundi prochain ! Au musée de l'armée se tient cette exposition passionnante qui confronte littérature et histoire. Partant des Trois mousquetaires de Dumas, le visiteur en retrouve les moments clés et découvre la réalité historique qu'ils recouvrent. 

On commence avec l'écriture des Trois mousquetaires par Dumas et Maquet : manuscrit (sans rature), journal de l'époque, etc. Puis l'on découvre l'armement d'un véritable mousquetaire : son mousquet, son épée. Pas de casaque originale avec la croix fleurdelisée, mais des costumes de théâtre et de cinéma car il ne reste pas de témoignage textile de cet uniforme. Ce corps militaire d'exception, créé par Louis XIII, sert à la fois de garde, de police et de troupe, notamment au Siège de Maastritch qui coûte la vie à d'Artagnan. Un peu plus loin dans le parcours, l'entrainement des mousquetaires (lettrés et militaires) est explicité. C'est là que l'on peut admirer une animation amusante qui reprend les illustrations du traité d'escrime de Capo Ferro.

épées mousquetaires

Outre les mousquetaires, tout le contexte du roman est passé au crible : qui était Louis XIII, était-il ce roi soumis et mou qu'imagine Dumas ? Et Richelieu, un cardinal diabolique ? Et Milady ? Et cette histoire des ferrets ? Eh bien ce n'est pas vraiment une invention même si l'aventure de Dumas relève moins de l'espionnage international que de l'intrigue amoureuse. De même, l'exposition présente rapidement le siège de la Rochelle, la Fronde, la Révolution anglaise, le masque de fer (avec six hypothèses illustrées par autant de masques) et le siège de Maastricht. Bref, on avance jusque Vingt ans après

Par ailleurs, le goût pour le personnage du mousquetaire, popularisé par Dumas, est évoqué. Il se retrouve dans la peinture du XIXe siècle puis le cinéma au XXe siècle. 

Et puis, on se balade dans le Paris des mousquetaires (borne tactile très intéressante et fort bien faite sur la géographie de Paris en 1620, 1840 et 2014). 

Masque de fer mousquetaires

On apprend également qui était le véritable d'Artagnan, ce cadet de Gascogne, Charles Ogier de Batz et qui étaient ou auraient pu être ses amis Aramitz, Porthau et Athos. Enfin, on s'arrête sur d'autres mousquetaires maintenant oubliées et l'on apprend que Louis XVIII a recréé en 1814 une compagnie de mousquetaires alors qu'elles avaient été dissoutes en 1775 (plus de budget). Je te raconte même pas le style de l'uniforme...

Pour terminer, on peut se déguiser en mousquetaire à la sortie de l'expo tout en suivant un duel ! 

Cette exposition, qui vise à distinguer légende et réalité, est très bien documentée et pédagogique : les panneaux et les cartels sont clairs, les œuvres bien identifiées et en nombre raisonnable. Les dispositifs interactifs sont très bien intégrés dans le parcours et apportent une réelle plus value. Réconciliant à la fois le grand public, notamment les plus jeunes, et le public plus averti, elle propose un contenu intéressant aux deux grâce à différents niveaux de discours. Une exposition bien menée, comme j'aimerais en voir plus souvent ! 

mercredi 9 juillet 2014

Indiens des plaines

Le musée du Quai Branly nous invite à découvrir les peuples qui vivent (et vivaient) dans les grandes plaines centrales d'Amérique du Nord. J'imagine que, comme moi, tu imagines des Sioux chassant les bisons. Eh bien, il n'y a pas que les Sioux dans ce coin ! Il y a presque une vingtaine de peuples différents. C'est ce que t'annonce une belle carte à l'entrée de l'expo. Mais tu auras un peu de mal à distinguer qui fait quoi dans l'expo elle-même car les objets présentés ont des caractéristiques très proches.

M. Claw, Emergence, 2014 Branly
M. Claw, Emergence, 2014

Tout commence avec... l'art indien contemporain. Là je me suis demandée si j'étais pas en train de me planter d'expo. Mais non, le musée présente d'abord les créations contemporaines dans une première partie. Et c'est très chouette. Un bon moyen de prendre conscience de la pérennité des techniques et des motifs indiens, de la vivacité du sentiment d'indianité chez ces artistes (via des courtes vidéos). On s'étonne ainsi devant une chaussure recouverte de perles ou un costume de danse, devant un éventail de plumes, un tableau qu'on imagine sorti de chez Warhol, etc. On découvre également à quoi tiennent nos clichés à travers des extraits de quelques films marquants sur les indiens (et les cow boys) après avoir traversé un espace tactile pas mal fait. 

J. Okuma, Chaussures sabots, 2014
J. Okuma, Chaussures sabots, 2014

Quelques pas plus tard, une expo très différente. Dans cette nouvelle partie, on aborde l'histoire des amérindiens depuis le XVIe siècle jusqu'au début du XXe siècle. La scénographie, très neutre, tout en transparence permet d'apprécier sous toutes les coutures les objets et vêtements. Chaque rangée correspond à une période tandis que des événements phares courent sur le mur : expédition de Lewis & Clark, législation, usage du bison, mouvements de population, etc. Mais les objets présentés sont finalement assez similaires, on ne distingue pas vraiment les différentes cultures et périodes. Ou en tous, cas ce n'est pas là dessus qu'est centré le propos.

Lakotas ou Yanktons, Robe, 1780-1825 Branly
Lakotas ou Yanktons, Robe, 1780-1825

Cette exposition constitue une bonne introduction à l'histoire des indiens des plaines, à leur culture, mais l'on ressort un peu frustré. On aurait aimé en savoir plus sur la religion, les différents peuples et leurs rapports les uns aux autres, ainsi que sur la vie quotidienne. Il y a déjà pas mal de contenu dans l'exposition mais on en voudrait plus ! Bref, c'est le genre d'expo dont on sort avec l'envie d'acheter le catalogue et de se documenter, une expo qui suscite la curiosité !

G. Beaver, Tambour, 1891 Branly
G. Beaver, Tambour, 1891